Annie Genevard, nommée ministre de l'Agriculture le 23 septembre 2024, hérite d'un ministère en pleine tourmente. À 68 ans, cette figure du parti Les Républicains devient la troisième femme à occuper ce poste après Édith Cresson et Christine Lagarde. Les défis qui l'attendent sont nombreux et critiques pour l'avenir de l'agriculture française.
Un secteur en crise
Les agriculteurs français se trouvent confrontés à une crise multidimensionnelle. D'une part, le projet de loi d'orientation agricole, relancé après le mouvement paysan de l'hiver dernier, est actuellement à l'arrêt. Les syndicats FNSEA et Jeunes Agriculteurs demandent un texte plus ambitieux pour assurer la souveraineté alimentaire et soutenir la relève générationnelle, alors que la moitié des agriculteurs actuels approchent de l’âge de la retraite
Parallèlement, la question des épizooties pèse lourdement sur les éleveurs français. Trois grandes épizooties frappent simultanément les troupeaux, une situation inédite dans l’histoire agricole du pays. La fièvre catarrhale ovine décime les troupeaux de moutons, tandis que la maladie hémorragique épizootique touche les bovins dans l'Ouest, et la menace de la grippe aviaire reste présente en Bretagne.
Des récoltes catastrophiques et des pertes économiques
En outre, l'année 2024 marque les pires récoltes céréalières depuis quarante ans, avec une chute de 26 % des moissons, directement liée à une météo agricole avec des conditions extrêmes. Les pertes sont estimées à 3 milliards d'euros pour les céréaliers, principalement en raison de la baisse des exportations hors de l’Union européenne. Dans le secteur viticole, les vendanges 2024 sont en repli de 18 %, aggravant une crise du vin déjà sévère. L’ancien gouvernement avait déjà lancé un plan pour arracher entre 5 et 6 % du vignoble afin de lutter contre la surproduction.
Face à cette situation, les syndicats agricoles réclament la mise en place d’un Prêt Garanti par l’État (PGE) agricole, similaire à celui instauré durant la crise du Covid-19, pour aider les exploitants à faire face à ces pertes massives.
La PAC et la souveraineté alimentaire
Sur le plan européen, les agriculteurs français demandent une révision urgente des plafonds de versement dans le cadre de la Politique Agricole Commune (PAC). La France doit appliquer sans délai la récente autorisation de la Commission européenne pour relever ces plafonds, afin que les agriculteurs puissent recevoir leurs premières aides dès octobre 2024.
La souveraineté alimentaire, l'un des thèmes centraux de la mission d'Annie Genevard, est également menacée. Les syndicats insistent sur la nécessité de mieux protéger les filières nationales face à une concurrence internationale de plus en plus rude, notamment en réduisant les sur-réglementations européennes qui pénalisent les agriculteurs français.
Annie Genevard arrive à un poste où l'urgence est omniprésente. Les enjeux sont colossaux : entre la gestion des crises sanitaires, le soutien aux récoltes en difficulté et la révision des politiques agricoles européennes, la ministre devra trouver des solutions rapidement. Dans ce contexte de pression extrême, les agriculteurs envisagent déjà de se remobiliser si les réponses ne sont pas à la hauteur de leurs attentes