Une pétition dépasse 1,6 million de signatures en moins de deux semaines. Le monde agricole est plus que jamais au cœur des tensions entre souveraineté alimentaire, transition écologique et fracture démocratique.
Ce qu’on observe aujourd’hui
La contestation citoyenne contre la loi Duplomb a pris une ampleur inédite : plus de 1,6 million de personnes ont signé une pétition en moins de deux semaines. Ce rejet massif s’appuie principalement sur les craintes liées à la réintroduction de certains pesticides, à l’allègement des contraintes environnementales, et à une forme de déconnexion entre décisions politiques et attentes sociétales. Le gouvernement tente
Une loi défendue par les syndicats agricoles
Portée par le sénateur Laurent Duplomb (Les Républicains), la loi adoptée début juillet 2025 vise à « lever les freins à l’exercice du métier d’agriculteur ». Soutenue activement par la FNSEA et plusieurs organisations agricoles, elle introduit plusieurs mesures clés :
- La possibilité de recourir à des molécules phytosanitaires sous dérogation, dont certains néonicotinoïdes,
- Des aménagements pour l’agrandissement des bâtiments d’élevage,
- Un allègement des procédures administratives jugées trop lourdes par les professionnels.
Pour ses partisans, la loi est une réponse pragmatique à la crise agricole, à la pénurie de main-d'œuvre et à la pression internationale sur les coûts de production.
Une vague de contestation inédite
Mais la loi a suscité une réaction fulgurante. Le 10 juillet, Éléonore Pattery, étudiante en écologie, lance une pétition en ligne intitulée « Non à la loi Duplomb ». En quelques jours, le compteur explose :
- 500 000 signatures en 9 jours,
- 1 million atteints le 20 juillet,
- Plus de 1,6 million de signataires confirmés le 22 juillet.
Cette mobilisation dépasse largement les milieux militants : associations de consommateurs, professionnels de santé, enseignants, jeunes et retraités dénoncent une loi qui sacrifierait l’environnement et la santé publique au profit de la productivité agricole.
Vers un débat parlementaire à la rentrée
La Constitution prévoit qu’une pétition citoyenne dépassant 500 000 signatures issues de 30 départements peut déclencher un débat à l’Assemblée nationale. Ce débat pourrait se tenir dès la rentrée parlementaire du 16 septembre.
La présidente de l’Assemblée, Yaël Braun-Pivet, ainsi que la ministre de l’Agriculture Annie Genevard, ont exprimé leur volonté de donner suite à la mobilisation. Le gouvernement propose en parallèle une saisine de l’Anses, afin d’évaluer les risques sanitaires et environnementaux liés à certaines molécules réautorisées.
Un symptôme de fracture démocratique ?
La pétition contre la loi Duplomb cristallise un malaise croissant entre la société civile et une partie du monde agricole. Dans une tribune publiée sur Mediapart, des chercheurs parlent de “revanche citoyenne” face à un système perçu comme verrouillé par les lobbies agricoles.
De son côté, Laurent Duplomb dénonce une instrumentalisation idéologique : « On veut diaboliser les agriculteurs alors qu’ils nourrissent la France. » Pour lui, cette vague de signatures serait avant tout orchestrée par des réseaux militants écologistes.
Quel dialogue possible ?
Alors que les moissons 2025 s’annoncent exceptionnelles, le monde agricole se retrouve une nouvelle fois au centre d’un débat de société. Les prochaines semaines seront décisives. La question n’est plus seulement technique ou économique : elle est désormais politique, démocratique et culturelle.