Dérogations phytosanitaires : le soja et le pois chiche concernés.

  • Mis à jour : 07 Mai 2025   |   Publié : 05 Mai 2025
  • Temps de lecture : 2 minutes
Dérogations phytosanitaires : le soja et le pois chiche concernés.

Dans un contexte où la recherche d’alternatives aux produits phytosanitaires est plus que jamais d’actualité, le ministère de l’Agriculture a récemment accordé deux nouvelles dérogations temporaires pour des usages non autorisés jusqu’alors sur les cultures de légumineuses. Une décision qui répond à la fois à des pressions techniques sur le terrain et aux revendications de la profession agricole.

Pourquoi ces dérogations ?

Les cultures de légumineuses comme le soja et le pois chiche sont stratégiques pour la transition agroécologique et la souveraineté alimentaire de la France. Elles permettent notamment de réduire la dépendance aux engrais azotés grâce à leur capacité à fixer l’azote de l’air, et elles s’inscrivent dans les objectifs de diversification des assolements.

Mais elles restent aussi des cultures sensibles, exposées à de nombreux ravageurs, et souvent mal dotées en solutions phytosanitaires homologuées, en raison d’un marché jugé trop étroit pour susciter l’investissement des industriels dans des démarches d’Autorisation de Mise sur le Marché (AMM).

C’est dans ce contexte que deux produits vont pouvoir être utilisés de manière exceptionnelle et encadrée cet été.

Les deux produits concernés

1. Isard sur soja — autorisé jusqu’au 14 août 2025

  • Substance active : deltaméthrine (insecticide de la famille des pyréthrinoïdes)
  • Cible : pucerons, coléoptères, punaises et autres insectes ravageurs
  • Objectif : protéger les stades sensibles de la culture du soja, particulièrement en période de floraison et de formation des gousses.

L’usage d’Isard sur soja est justifié par une pression croissante de ravageurs, dans un contexte de températures élevées qui accélèrent les cycles biologiques des insectes.

2. Altacor sur pois chiche — autorisé jusqu’au 23 août 2025

  • Substance active : chlorantraniliprole (famille des anthranilamides)
  • Cible : essentiellement les lépidoptères (notamment les chenilles de la noctuelle ou de la légionnaire)
  • Objectif : permettre une protection ciblée du pois chiche, culture à haute valeur ajoutée mais peu pourvue en produits autorisés.

Le pois chiche est particulièrement sensible aux attaques de chenilles pendant la phase de floraison et de remplissage des gousses, périodes cruciales pour le rendement final.

Un équilibre délicat entre urgence agronomique et exigences réglementaires

Ces dérogations s’inscrivent dans le cadre de l’article 53 du règlement (CE) n° 1107/2009, qui autorise, à titre exceptionnel, l’usage temporaire d’un produit phytosanitaire sur une culture, en l’absence de solution efficace alternative et en cas de menace sérieuse pour la production.

Elles illustrent la tension permanente entre :

  • le besoin de sécuriser les récoltes dans un contexte climatique instable et de hausse des bioagresseurs,
  • et les objectifs de réduction des intrants chimiques portés par la stratégie européenne “De la ferme à la table” et le plan Ecophyto.

Quelle lecture pour l’agriculture de demain ?

Si ces dérogations apportent une réponse immédiate à des urgences techniques, elles soulignent aussi les fragilités structurelles de certaines filières encore émergentes. Elles posent plusieurs questions :

  • Comment développer rapidement des alternatives efficaces et économiquement viables ?
  • Quel rôle pour la recherche publique et la coopération interprofessionnelle dans l’homologation de solutions adaptées aux cultures dites "mineures" ?
  • Peut-on espérer une accélération des innovations en biocontrôle et en sélection variétale pour réduire la dépendance aux produits de synthèse ?

En résumé

  • Deux dérogations ont été accordées : Isard sur soja (jusqu’au 14 août) et Altacor sur pois chiche (jusqu’au 23 août).
  • Ces usages sont temporaires, encadrés et motivés par l’absence d’alternatives dans des contextes de menace avérée.
  • Elles mettent en lumière les limites actuelles du dispositif réglementaire et la nécessité de mieux accompagner les cultures de légumineuses dans leur développement.

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  • Cyril Combes Cyril Combes, Rédacteur chez Agryco
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