Les ONG demandent au gouvernement des actions concrètes et immédiates pour lutter contre le changement climatique, lors d'une conférence de presse tenue hier à Paris.
La lettre
« Monsieur le Premier Ministre, Mesdames, Messieurs les ministres,
Dans la nuit du jeudi 16 au vendredi 17 mai, l’Assemblée nationale a adopté l’article 1er du projet de loi d’orientation agricole. Cet article est presque intégralement conforme à la réécriture générale proposée par les rapporteurs de la majorité élargie (suite à de nombreux échanges avec le gouvernement et le groupe Les Républicains).
En l’état, l’article finalement adopté comporte malheureusement deux nouveaux reculs environnementaux : la suppression du code rural des objectifs chiffrés en matière de surface agricole utile (SAU) cultivée en agriculture biologique (AB) et en légumineuses. Pourtant, ces deux objectifs permettaient d’affirmer des orientations claires, concrètes et nécessaires pour guider notre agriculture vers un modèle plus souverain, durable et résilient. »
Les objectifs
Depuis la loi Egalim du 30 octobre 2018, le code rural fixe l'objectif de porter à 15 % la Surface Agricole Utile (SAU) en Agriculture Biologique (AB) d'ici 2022. Hélas, cet objectif n'a pas été atteint, atteignant seulement 10,7 % en 2022. Ce résultat décevant s'explique principalement par un manque de financements publics, notamment après la suppression des aides au maintien en 2017, ainsi que par l'absence d'une politique publique efficace pour structurer les débouchés.
Bien que l'échéance initiale pour cet objectif soit désormais dépassée, le Code rural aurait pu être actualisé pour intégrer explicitement le nouvel objectif du Programme Ambition Bio : atteindre 18 % de la SAU en AB d’ici 2027. Si la mention de ce programme dans la réécriture est appréciable, elle ne possède pas la même valeur juridique ni la même garantie de protection qu’une inscription dans le Code rural. En effet, une stratégie gouvernementale peut être modifiée par une simple décision du gouvernement, tandis que le Code rural ne peut être modifié qu’après un vote au Parlement.
Cette suppression représente un pas en arrière, car il est largement reconnu par la communauté scientifique que l’agriculture biologique est l’un des systèmes de production agricole qui génère les externalités positives les plus significatives, tant sur le plan environnemental que socio-économique.
Les objectifs pour les légumineuses
Depuis la loi Climat et Résilience du 22 août 2021, l'objectif d'atteindre 8% de la SAU en légumineuses d'ici 2030 est inscrit dans le Code rural. Le développement des cultures de légumineuses est en effet d'une importance cruciale :
- Pour assurer notre souveraineté alimentaire, il est crucial de développer la culture de légumineuses. Actuellement, la France importe en moyenne 3 millions de tonnes de soja par an, principalement d'Amérique du Sud, plus de 80 % de nos engrais, et les deux tiers des protéines végétales nécessaires à la consommation humaine. Alors que la France élabore un plan de souveraineté pour les engrais, les légumineuses se présentent comme une solution incontournable, étant la seule source d'azote primaire naturelle
- En raison de leurs avantages agronomiques et environnementaux : réduction de l'utilisation des engrais grâce à leur capacité naturelle à fixer l'azote ; stabilisation et augmentation des rendements céréaliers dans les systèmes de rotation ; amélioration de la fertilité des sols, et bien plus encore
De plus, selon la LPO, l'adoption de l'article 1 n'a pas permis aux parlementaires de voter en toute connaissance de cause en raison de plusieurs facteurs :
- Des votes rapides sur les 500 sous-amendements, enchaînés les uns après les autres, plusieurs heures après leur présentation par les députés
- L'omission de ces deux suppressions dans l'exposé des motifs de l'amendement de réécriture générale proposé par les rapporteurs
Ainsi, nous, associations de paysans, de protection de l’environnement, de consommateurs, de solidarité, de la santé, de protection animale et acteurs de l’économie sociale et solidaire, appelons le gouvernement à intégrer dans le code rural deux objectifs essentiels : atteindre 18 % de la SAU en agriculture biologique (AB) d’ici 2027 et 8 % de la SAU en légumineuses d’ici 2030. Nous insistons pour que ces objectifs soient pris en compte lors de la poursuite de l’examen de la Loi d’orientation agricole (LOA) à l’Assemblée nationale, de son passage au Sénat, ou lors de la Commission mixte paritaire.
Plusieurs députés des groupes Renaissance et Les Républicains, dont Sandrine Le Feur, rapporteuse pour la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, ont déposé des sous-amendements en ce sens. Leur réintégration dans le code rural garantira leur valeur juridique et orientera le modèle agricole envisagé pour 2030, avec des objectifs clairs et quantifiables, conformément à l'esprit de la planification écologique.