Pluie et agriculture : un véritable casse-tête

  • Mis à jour : 14 Octobre 2025   |   Publié : 10 Avril 2024
  • Temps de lecture : 1 minutes
Pluie et agriculture : un véritable casse-tête

Les agriculteurs dans la tourmente

Depuis des semaines, les agriculteurs examinent avec une attention soutenue les prévisions météorologiques et leur baromètre, dans l'espoir d'identifier une période de temps clément et assez longue pour que les terres puissent sécher. Ceci leur permettrait de progresser dans leurs plantations de printemps. Malheureusement, le temps ne leur a pas été clément : un mois de mars exceptionnellement pluvieux, suivi par un début d'avril erratique, ponctué par les premières tempêtes, a compliqué la situation.

Une pluie très abondante au cours des dernières semaines

Depuis le début mars, nos terres agricoles ont connu des précipitations exceptionnellement fortes. À l'exception notable de la plaine du Roussillon, chaque région a vu des niveaux de pluie nettement supérieurs aux moyennes habituelles, avec des accumulations parfois impressionnantes. À Bordeaux, par exemple, les précipitations ont grimpé à 164 mm, bien au-delà de la moyenne mensuelle de 64 mm, signalant un surplus remarquable de +158%. De même, le Centre-Est a été témoin d'une pluviométrie extraordinaire, avec 165 mm à Nevers, loin devant la normale de 53 mm. À Lyon, les précipitations ont presque triplé la moyenne de mars, atteignant 138 mm contre les 49 mm habituels. Le Bassin parisien n'a pas été épargné, enregistrant 86 mm de pluie à Paris, presque le double de la normale de 45 mm.

Dans le sud-est, des records ont été battus, notamment de l'est du Languedoc à la région PACA. Nîmes a expérimenté des niveaux de pluie historiques à 250 mm, dépassant largement la normale de 45 mm et établissant un nouveau record pour mars. Un phénomène semblable a été noté en Provence, où Tarascon dans les Bouches-du-Rhône a comptabilisé 223 mm, soit six fois la normale.

La quantité d'eau dans les sols inhibe leur assainissement

Au début du mois d'avril, de nombreuses régions présentent des sols saturés d'humidité, résultat des pluies constantes et de l'absence de périodes prolongées de soleil et de sécheresse.

Dans certaines régions, le sol est devenu tellement compact qu'il ne peut plus absorber l'eau de pluie, ce qui provoque l'apparition de flaques dans les champs. Cette situation, exacerbée par les inondations résultant des crues fluviales, a entraîné des débordements sur les terres cultivées. Bien que quelques espèces végétales puissent supporter une immersion temporaire, une saturation prolongée du sol nuit considérablement à leur croissance en restreignant l'accès de leurs racines à l'oxygène. Cela peut mener à la pourriture des végétaux et détériorer la qualité des récoltes. En outre, un excès d'humidité crée un environnement propice aux maladies, fragilisant les cultures et réduisant d'autant plus les rendements.

Du retard dans les semis de printemps

Face à un climat instable et humide, les agriculteurs de plusieurs régions sont confrontés à d'importants retards dans le calendrier des semis de printemps, posant de sérieux défis pour le secteur agricole. Arnaud Pamart, agriculteur en Seine-et-Marne, met en avant la fenêtre cruciale du 10 février au 15 mars pour le semis de l'orge de printemps, essentielle pour garantir une croissance optimale en prévision de la moisson de juillet.

La limite absolue pour planter l'orge est le 15 avril, à condition que les conditions météorologiques soient favorables après le semis. Toutefois, dans certaines régions du nord de la France où l'humidité des sols persiste, des agriculteurs se voient forcés d'opter pour des cultures de remplacement, comme la betterave ou le maïs, qui offrent la flexibilité d'une plantation ultérieure dans la saison.

Dans l'immense Bassin parisien et le nord de la France, seulement 10 à 20% des champs dédiés à la culture de la betterave sucrière ont pu être semés cette saison. La fenêtre de semis traditionnelle, qui s'étend du 15 mars au 15 avril, a malheureusement coïncidé avec une période de précipitations exceptionnelles, rendant les conditions de semis particulièrement difficiles.

Arnaud Pamart souligne le rôle crucial des prochaines semaines d'avril : elles pourraient encore offrir une opportunité de semer les betteraves dans les temps, à condition que le climat s'améliore de manière significative et constante. Une telle amélioration est essentielle pour prévenir une baisse marquée du rendement lors de la récolte en automne. Bien que d'autres cultures comme les pommes de terre et le maïs jouissent d'une plus grande marge de manœuvre pour la plantation, elles requièrent elles aussi une période étendue de temps sec pour une mise en terre dans des conditions idéales.

Des élevages confinés en attendant le beau temps

Dans certaines régions agricoles, les pluies fréquentes rendent les sols trop mous, compromettant ainsi l'efficacité du pâturage pour le bétail. Si l'humidité et la douceur des températures contribuent à la croissance des herbes, les conditions météorologiques obligent souvent les animaux à rester à l'abri.

Cette situation force les éleveurs à fournir un complément de foin, posant un véritable défi pour ceux qui n'ont pas prévu un stock suffisant de nourriture. Cette difficulté est exacerbée pour ceux qui avaient déjà diminué leurs réserves au début de l'automne précédent, suite à un été exceptionnellement sec qui a perduré jusqu'en octobre.

Attendues en fin de semaine en France, les conditions anticycloniques promettent une éclaircie bienvenue, bien que brève. Le temps se gâtera dès le début de la semaine suivante, avec des précipitations s'étendant sur une large partie du pays. Cependant, nos prévisions météorologiques à quatre semaines laissent entrevoir une nette amélioration vers la fin d'avril. Cette embellie pourrait marquer le retour à des conditions plus sèches et stables, juste à temps pour profiter pleinement du printemps avant qu'il ne soit trop tard.


  • Cyril Combes Cyril Combes, Rédacteur chez Agryco
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